L’odyssée du Pau FC
1959-2024 : Quand s’ouvriront les Jeux Olympiques de Paris, le 24 juillet 2024, le club phare du football palois fêtera ses 65 printemps. Un « petit jeunot », comparé à ses glorieux aînés, ces alertes centenaires que sont les anciens patronages palois, Bourbaki, les Bleuets ou la JAB. S’il n’a pas leur ancienneté, le Pau FC se singularise en étant le seul à accéder au football professionnel, avec la montée en Ligue 2, en 2020.
Une histoire riche, passionnante, qui ne fut pas un long fleuve tranquille, faite d’incessants rebondissements, de montées, de descentes, avec même un dépôt de bilan et une liquidation judiciaire. Parfois à deux doigts de toucher le graal, sans jamais pouvoir l’atteindre.
Cela finira par lui sourire, dans des circonstances exceptionnelles, en raison de la pandémie liée au Covid 19. Le 14 mars 2020, l’Etat décrète le confinement total du pays. Toutes les compétitions sportives sont mises sous cloche jusqu’à nouvel ordre. Reprendront-elles un jour ? Après quelques semaines d’incertitude, la réponse est non. La FFF (Fédération Française de Football) décide que la saison 2019-2020 s’arrête là. Il reste une dizaine de journées à disputer, elles sont annulées. Les classements sont bloqués dans l’état où ils se trouvent lorsque les compétitions sont arrêtées. Leader du championnat National, le Pau FC est au bon endroit, au bon moment. Sa première place lui permet d’accéder en Ligue 2.
Un club "nomade"
Que de chemin parcouru, depuis la création en 1959. Prenant la suite des Bleuets de Pau, en CFA (Championnat de France Amateur), le Pau FC, dans sa version originale est créé le 19 mai 1959. Quand ils portent ce nouveau club, sur les fonts baptismaux, les premiers dirigeants commettent quand même le péché originel que ce club va traîner comme un boulet : « Un club était né, mais c’était un club sans stade, ni siège, ni salle de réunion, un club nomade, relate l’historien de l’époque. Quel optimisme n’a-t-il pas fallu pour imaginer que ce club qu’ils créaient pourrait survivre. Et il a survécu ! »
Grâce bien évidemment, « à l’hospitalité bienveillante des Bleuets et de Bourbaki, à l’amicale autorisation de l’armée pour le stade du Hameau, » à la création du stade de l’Ousse des Bois, en 1968, dont il fut le club résident, aux délocalisations à la Croix du Prince (stade de rugby de la Section Paloise), pour les « grosses » affiches de Coupe de France, dans les années 80.
C’est à l’orée de la saison 1991-1992 que le FC Pau intègre le stade du Hameau, mais rapidement en partage avec la Section Paloise. La séparation à l’amiable se fait en 2018, avec la création d’un stade dédié uniquement à la pratique du football, le Nouste Camp, nom donné par Christian Sempé journaliste à Pyrénées Presse, et qui sera retenu par la ville de Pau et le club. Dès la deuxième année, le Pau FC accède en Ligue 2. Le manque de stade avait-il contrarié à ce point, son développement et ses ambitions ? Ce serait bien réducteur, mais le fait de disposer de son propre outil de travail est un facteur incontestable de développement. Dans son nouveau stade fétiche, le Pau FC a rapidement pris ses marques. Il fait des débuts prometteurs dans le milieu du foot professionnel. Mais le plus dur sera de confirmer.
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Les pionniers
En 1958, les Bleuets sont au faite de leur gloire. Champions de Division Honneur de la Ligue du Sud-Ouest, ils accèdent, pour la première fois de l’histoire du football à Pau, au très relevé Championnat de France Amateur (CFA), antichambre, à l’époque, du foot professionnel. Une ascension fulgurante, en sept saisons, depuis le titre de champion départemental du District des Pyrénées, en 1951. Le capitaine, Pierre Lanusse, est le symbole de toutes ces montées successives auxquelles il a participé.
Le maintien est au bout de cette première saison 1958-1959, mais celle-ci reste surtout dans l’Histoire par le parcours en Coupe de France et cette confrontation, le 14 décembre 1958, dans un stade de l’Avenue de Buros plein à craquer (6000 supporters), lorsqu’ils poussent les Girondins de Bordeaux aux prolongations. Le score est nul (1-1), à la fin du temps réglementaire, mais les Bordelais finissent plus fort (4-1).
Cette accession au plus haut niveau amateur ne sera pas sans conséquences. Le foot ayant pris une autre dimension, c’est le moment pour le patronage de passer le témoin. Un nouveau club est créé à cet effet, pour assurer la pérennité du foot à ce niveau. Ce sera le Pau Football Club, déclaré au Journal Officiel le 2 juillet 1959 qui prend la place des Bleuets en CFA. Les pionniers sont tous issus des Bleuets.
Gardiens de but : André Braneyre, Yves Machtou ; arrières : Marcel Isabel, Jean Saubat, Pierre Lille, Daniel Marrouat ; demis : Pierre Lanusse, Elie Ruiz, Jacques Berth, José Ruiz, Georges Nougué ; inters : Henri Escartin, Gérard Delmas ; ailiers : René Tardan, Jean-Jacques Rollin, René Biarge ; avant-centres : René Lanusse, Angel Uriarte.
Une nouvelle équipe dirigeante se met en place, autour de l’industriel José Bidegain qui en devient le premier président. Béla Herczec, Hongrois d’origine, ancien professionnel de Montpellier, Alès et Sochaux, reste l’entraîneur.
Crise de croissance ?
Le Pau FC est attractif. Sur les premières saisons, les meilleurs joueurs régionaux venus de Bourbaki, Arudy, Orthez, Mourenx, le rejoignent. On y retrouve, Jean-Louis Jamboué, Lilou Fortané, Ricarrère, Poeydomange, Lissarague. C’est aussi la montée d’un junior prometteur, André Altuzarra et l’arrivée de rapatriés d’Algérie, Manuel Gimenez et Jean-Pierre Martinez.
Le Pau FC devient FC Pau, en juin 1962. Le Docteur James Chambaud prend la présidence lors de l’Assemblée Générale du 8 juin 1964.
Les meilleurs joueurs, Jamboué, Lissarague, Sanchez et Altuzarra sont sollicités par les Girondins. En même temps, le club va connaître des difficultés financières. L’entraîneur Bela Herczec est parti à Alès.
Les symptômes d’une croissance trop rapide ?
Guy Paternotte, puis Jo Lopez prendront successivement les rênes de l’équipe première. Malgré la descente en Division Honneur, l’effectif reste de qualité. Certains joueurs reviennent. Libéré de ses obligations militaires au Bataillon de Joinville, Jean-Pierre Altuzarra intègre le club. Le capitaine de l’équipe de France « Juniors », Paul Escudé signe à l’orée de la saison 1966-1967. Le FC Pau est champion de la Ligue du Sud-Ouest en 1968 et remonte en CFA.
Le Stade de l’Ousse des Bois est mis à sa disposition. Mais les résultats ne suivent pas et après une série de descentes successives, il se retrouve en Promotion de Ligue, le plus bas niveau régional.
La Coupe de France pour révélateur
Pierre Clède accède à la présidence, en 1975. Il va donner une nouvelle impulsion. D’entrée, il place la barre très haut : l’objectif, c’est la montée en Deuxième Division. Pendant 15 ans, il va œuvrer au développement du club, à la formation des jeunes. Le Pau FC se mêle à la lutte à la montée, à plusieurs reprises, mais il est toujours barré au dernier moment, après avoir occupé souvent la première place.
Avec Jean-Pierre Altuzarra, puis le Montois Jacques Foix (ex-international) comme entraîneurs, le FC Pau remonte au firmament du football régional, puis retrouve le niveau national, en Division 4, dès 1978.
En 1981, Paul Escudé est nommé entraîneur. Il sera le grand artisan de ces années fastes, prônant un football offensif, fait d’exigence et de rigueur.
Avec méthode, il construit son équipe en s’appuyant sur les meilleurs joueurs locaux. C’est l’époque où Bernard Laporte-Fray, Joël Lopez, Robert Péré-Escamps, Jean Pascual, Patrick Liquet, Hervé Loustaunau forment l’ossature d’une équipe qui monte en Troisième Division, en 1983.
Il ne reste plus qu’une marche à gravir, la plus difficile, certes, mais le Pau FC prend alors une autre dimension. Il va jouer les premiers rôles, dans ce championnat de Troisième Division, mais Niort, Bourges, Angoulême, Saint-Seurin sur l’Isle le coifferont toujours sur le poteau de la montée.
Après un parcours chez les professionnels, les Palois Dominique Vésir, Jacques Lavoignat, mais aussi Patrick Soubies reviennent « au pays », pour encadrer les joueurs locaux.
Recrutement aussi à l’extérieur qui verra défiler le défenseur yougoslave Branko Mamula, le champion d’Afrique avec son pays, le Sénégal, Herman Kingue, mais encore l’espoir français, formé à Nantes, Xavier Gravelaine. Venu pour jouer milieu de terrain, il éclaboussera à un poste d’ailier gauche. Sa carrière était lancée. C’est l’époque aussi où les supporters béarnais découvrent les émotions fortes de la Coupe de France. Le FC Pau construit sa légende, en se frottant aux clubs professionnels, dans un Stade de la Croix du Prince, bouillant comme un chaudron, contre Besançon, Nancy (entraîné par Arsène Wenger), Bastia.
Le 4 mars 1989, match de légende encore contre l’Olympique de Marseille et une constellation de stars, en 32e de finale de la Coupe de France, délocalisé au Stade Aguilera de Biarritz, où se pressent 10 000 spectateurs. Il tombe des trombes d’eau, le vent souffle en rafales à 100 km/h. La partie devrait être renvoyée au lendemain, mais l’entraîneur marseillais Michel Hidalgo et le capitaine Jean-Pierre Papin n’ont pas l’intention de dormir à Biarritz. On joue quand même dans des conditions dantesques.
L’OM se qualifie 4 à 0, avec un pénaltie de Papin et un triplé de l’international allemand, Allofs.
La Coupe de France a révélé des talents, mais les efforts consentis depuis plus d’une décennie ne sont pas récompensés par la montée. Le cycle de Paul Escudé s’achève en 1990 et Jean Gallice est nommé entraîneur. Le maintien est sauvé de justesse. Pierre Clède va lâcher la présidence.
Grandeur et décadence
C’est Alain Pitoun, agent immobilier, qui prend la relève, en juin 1991, avec le soutien inconditionnel d’André Labarrère, maire de Pau et une équipe dirigeante complètement renouvelée, où Éric Sidobre pour le volet organisation et Richard Allenda, dans le rôle du directif sportif, vont se révéler de précieux collaborateurs pour conduire une croissance aussi rapide que spectaculaire.
Le FC Pau s’installe au Stade du Hameau. Paul Escudé est rappelé au poste d’entraîneur, mais il sera rapidement remplacé par Slavo Muslin. L’effectif se professionnalise avec les arrivées de Claude Lowitz, Patrick Cubaynes, Jean-Jacques Nono, Racha Radovanovic et l’Américain Billy Thompson, pour les plus connus dans le monde des pros. Les saisons suivante, Pascal Planque, Jean-Pierre Meudic, Samy Boutal, Nicolas Forge, Laurent Peyrelade, apportent expérience et rajeunissement à un solide noyau de joueurs locaux, où s’imposent Joël Lopez, Roland Lagaronne, Laurent Sykora, Xavier Legaz.
Le FC Pau renoue avec son glorieux passé en Coupe de France et fait chavirer le Hameau à plusieurs reprises. En 1991, contre Nîmes, en 16e de finale, avant d’être éliminé aux tirs au but, à Caen (Première Division), en huitième. Parcours remarquable, encore, la saison suivante, avec une qualification au bout de la nuit, devant plus de 15 000 spectateurs, au Hameau, contre Saint-Etienne, en huitième de finale. Mais il est éliminé en quart de finale, contre Charleville-Mézières.
La richesse de l’effectif lui permet de jouer sur les deux tableaux. Le FC Pau termine premier de son groupe et il doit disputer un match de barrage pour la montée en Deuxième Division, à Lyon Duchère. Il s’incline 2 à 1. Y a-t-il hors-jeu, sur le but de la victoire des Lyonnais ? Pas de doute dans le camp palois, mais ce coup de théâtre va être lourd de conséquences pour le FC Pau. La porte du monde professionnel se referme une fois de plus, au tout dernier moment. La bouffée d’oxygène dont les finances du club auraient eu bien besoin s’éloigne définitivement.
Ironie de l’histoire, la montée sera refusée à Lyon Duchère, par manque d’installation. Le FC Pau est reversé dans le nouveau championnat National qui est créé, avec accession directe pour la D2. Maigre consolation qui ne permettra pas de sauver ce qui aurait peut l’être encore.
Le président Alain Pitoun qui connaît des difficultés professionnelles passe la présidence à Albert Sadoun. A l’orée de la nouvelle saison 1994-1995, la crise couve parce que le club est très endetté et les salaires ne sont pas versés.
Déclenchée par les joueurs qui se mettent en grève, elle éclate au grand jour, à la fin du mois d’octobre. Le montant du passif exigible est de 4 millions de francs, dont près d’un million à l’URSSAF. Le 22 décembre 1994, le tribunal de commerce nomme un administrateur judiciaire, Maître Christian Caviglioli, qui va expédier les affaires courantes. La liquidation judiciaire est inéluctable. Elle est prononcée par le tribunal, le 7 février 1995.
La renaissance
Le FC Pau est mort et son équipe est en position de relégable. Cependant, dans l’attente d’un repreneur, la FFF autorise la poursuite du championnat, après avoir décrété la descente automatique en fin de saison et, si l’équipe est toujours relégable sportivement, ce sera de deux divisions.
L’effectif est considérablement amoindri, les principaux joueurs aux salaires importants sont libérés de leurs contrats. Le challenge de la reprise est risqué. La rumeur n’a jamais été confirmée, mais André Labarrère aurait approché Louis Nicollin, PDG d’une importante entreprise de nettoyage à Montpellier et président du club. A son actif, la montée du petit club de quartier de La Paillade, en Première Division.
Pour « Loulou », l’opération ne serait réalisable qu’à la seule condition de devenir prestataire du ramassage des ordures ménagères de l’agglomération paloise, comme il le fait dans plusieurs villes du grand Sud.
Un marché que le maire de Pau ne pouvait accepter et Louis Nicollin ne sera jamais Béarnais.
Ce sont Bernard Laporte-Fray et le revenant Pierre Clède, qui présentent un dossier de reprise.
La page de l’ancien président avait été tournée et c’est le projet de Bernard Laporte-Fray qui a les faveurs du pouvoir politique local, dans un subtil dosage d’anciens et de nouveaux dirigeants.
A la barre du tribunal de commerce, Maître Courrège et Maître Legrand acceptent la proposition de reprise de Bernard Laporte-Fray qui s’acquitte d’une somme de 500 000 Francs et lui donnent cinq minutes pour changer le nom du club. Ce sera désormais, le Pau FC.
Les bases d’un nouveau départ sont posées. Une sorte de renaissance après avoir frôlé la disparition pure et simple.
L’ancien capitaine des années 80, Robert Péré-Escamps, est nommé entraîneur. Au classement, la situation est très compromise. En 4 mois, avec un effectif rajeuni et remanié, dont le jeune Palois Cédric Pardeilhan qui est repéré par le Paris Saint-Germain, le Pau FC réussit l’exploit d’éviter la double relégation.
Michel Sanchez aura contribué particulièrement à cette réussite. Avec 74 buts inscrits entre 1994 et 1997, il est toujours le meilleur buteur du club.
Dix saisons en National
Ce maintien sportif en National 2 permet au nouveau Pau FC de rester attractif et d’envisager un retour en National. Après avoir été une figure emblématique de la grande époque des Girondins de Bordeaux (1980-1988), René Girard devient l’entraîneur de l’équipe paloise. Il effectue un recrutement de qualité, à l’orée de la saison 1997-1998. Mais « la mayonnaise » ne prend pas comme prévu et à la trêve, il est remplacé par l’ancien joueur, Pascal Planque. Le changement va être bénéfique. Avec une longue série de victoires, le Pau FC refait son retard sur les équipes de tête et passe leader, à quelques journées de la fin du championnat. Il fait aussi un beau parcours en Coupe de France, éliminant Saint-Etienne, au Hameau, le 20 décembre 1997, mais il est éliminé (1-0), contre le Paris-Saint-Germain, sur un but de Raï, capitaine à l’époque du Brésil, à l’issue d’une rencontre très mouvementée au stade du Hameau. A noter que le jeune Palois Edouard Cissé qui avait été recruté par le PSG à l’intersaison, a fait sa rentrée, en seconde mi-temps, contre ses anciens partenaires, sous les yeux de sa famille et de ses nombreux amis.
La saison se termine en apothéose, avec la montée en National, dans une liesse populaire, par une victoire, (2-0), contre Muret, lors de la dernière journée.
Une première marche vers la Ligue 2 ? C’est ainsi que le présente le président