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Ernest Gabard

(1879-1957)
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Texte de Jacky Decaunes,

auteur du livre "Ernest Gabard"

/ Biographie

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Ernest Gabard, est né le 18 mai 1879 à Pau et mort en 1957.

Témoin des IIIe et IVe Républiques, le sculpteur palois Ernest Gabard a non seulement laissé en héritage un nombre important d’œuvres mais aussi un regard, parfois engagé, au fond duquel le talent de l’artiste tutoyait sa grande humanité. 

Ernest Gabard est né en 1879, rue Samonzet, à Pau. Orphelin très jeune, il quitte le Béarn à 17 ans pour suivre, à Paris, les cours de l’école des Beaux-Arts puisqu’il sait depuis toujours qu’il sera sculpteur. 

Il devient l’élève du Prix de Rome Gabriel-Jules Thomas. Mais les relations entre eux se détériorent. Le petit Béarnais a du caractère et il en paiera le prix. Cela ne l’empêche pas de fréquenter l’atelier d’Auguste Rodin. Face au modelage d’une main, le maître lui lance : « C’est bien mais ça sent l’école ! Rendez plus personnelles vos ébauches… » Les encouragements ne suffiront pas à en faire un exécutant habituel. 

Jacky Decaunes remarque que Gabard, fasciné par la dextérité de l’artiste, sera largement influencé par Rodin comme en témoignent ses premières réalisations. « Il retient le réalisme puissant, la science impeccable et l’inspiration fiévreusement expressive qui font de ses réalisations des chefs-d’œuvre ». 

À la fois déçu par la vie parisienne et touché par le mal du pays, le jeune homme de 20 ans préfère rentrer à Pau. Gabard aimait aussi la comédie, la fête, comme le montre la suite de sa vie. Il pratique une nouveauté en ce début de XXe siècle : le sport, de la pelote au ski

Il traverse la grande guerre en soldat. Et en artiste : les aquarelles des scènes de vie des poilus sont issues du cantonnement, « tantôt à l’arrière, tantôt au feu, toujours dans un relatif répit ». Elles rappellent à quel point l’œil de Gabard était précis. La main, sûre. Le cœur, grand. 

La Der des Der finie, terriblement transformé par les horreurs, l’artiste signera dès lors la réalisation d’une quinzaine de monuments aux morts dans sa région. Une majorité d’inspiration pacifiste comme « La Pleureuse d’Assat », « Le Regard perdu de Soumoulu » ou « Le Vieillard et l’enfant de Mauléon ». 

Un touche-à-tout 

Ernest Gabard allait avoir le temps, désormais, de démontrer l’étendue de ses capacités créatrices. Jacky Decaunes parle d’un touche-à-tout. Il n’a pas tort : dessins, peintures, affiches, pointes sèches, gravures, taille directe sur bois ou pierre… Il invente même le personnage emblématique de Caddetou, une sorte de BD avant l’heure mettant en scène un Béarnais roublard. Plusieurs de ses statues font partie du paysage palois comme « La Femme au puits » ou « La Fontaine aux enfants ». Il a également représenté de nombreuses personnalités de son temps. 

Sa signature brille avec toujours autant d’éclat après sa mort en 1957. En hommage, la société des Amis des arts de Pau a créé le prix Ernest Gabard. Le collège de Jurançon porte aussi son nom.

Ernest Gabard et l’apparition de nouveaux sports en Béarn

L'athlète Henri Sallenave

Les classes moyennes et la bourgeoisie paloises vont sous la houlette d’un homme avant-gardiste se trouver un chef de file, véritable touche-à-tout du sport : Henri Sallenave

Champion de France d’athlétisme (saut en hauteur en 1900, 110 mètres haies en 1901) joueur de rugby, co-fondateur du Stade Palois et pelotari au sein de la Section Paloise, cet athlète introduit le premier l’usage des skis dans les Pyrénées. Visionnaire, avec l’aide de quelques amis, il provoque la venue des frères Wright à Pau.


Ce fils de bonne famille (son frère Louis sera maire de Pau de 1947 à 1971) va exceller dans tous les sports qui éclosent à cette époque et entraîner dans son sillage et ses passions son ami Ernest Gabard

Grâce à lui, Ernest Gabard va approcher l’aviation, les sports de montagne, particulièrement le bobsleigh, l’athlétisme et le rugby. Ernest Gabard, athlète accompli lui aussi, laisse son nom à la postérité au cours de compétitions sportives de haut niveau que seule sa modestie tempère.

Durant sa vie entière Ernest Gabard va dessiner et créer des œuvres consacrées au sport. Mais avant de converger vers ses « nouveautés » il pratique avec assiduité le tir à l’arc et la pelote basque.

Le tir à l’arc

Hormis la chasse qu’il a pratiquée, le seul tir auquel se soit adonné Ernest Gabard, pour le plaisir, est le tir à l’arc pour lequel il voue une passion particulière. Il l’exerce déjà en 1900, sur son terrain de l’avenue Trianon, alors que l’atelier n’est pas encore construit, où seulement les fouilles sont creusées, la cible étant placée au milieu des tas de gravats.

Plus tard, en 1935, il est élu président du nouveau « Groupement des Archers de Pau ». Un « Jardin d’Arc » est installé et inauguré au stade Bourbaki. C’est là qu’il vient désormais décocher ses flèches.

Ce stand de tir, long de 50 m, comporte à chaque extrémité une construction en planches, qui abrite les cibles, le matériel et les tireurs. Les six portants dressés entre les deux cibles, servent de protection contre les flèches « égarées ». La réalisation du site est due à MM. Challe, Bohl et Aguilar.

Le matériel utilisé n’a rien de commun avec les arcs actuels en carbone-céramique, munis de poulies, avec aide à la visée et stabilisateurs. Ils sont en bois de la poignée aux branches, dignes descendants de ceux utilisés par Cochise et Crazy Horse.

Les archers palois ne viseront jamais le Cordon Doré ni le Style continental, ils s’adjugeront seulement de bons moments.

Le jour de l’inauguration, chacun des invités s’essaye avec plus ou moins d’adresse au nouveau fleuron de la couronne de la Reine des Sports, selon l’expression du maire Gaston Lacoste

À cette occasion, Ernest Gabard, peu avare de conseils, dispense son savoir au docteur Rozier, aux généraux Clemençon et Panchaud, au capitaine Chapou ainsi qu’au président du Saint-Hubert Club.

La Pelote Basque

La pelote basque est un sport issu d’une évolution du jeu de paume. Mais alors que le jeu de paume décline un peu partout, vers la fin du XVIIIème  siècle, le Pays-basque lui redonne vie en modifiant ses règles et crée le jeu de pelote. 

 

Ce jeu de pelote va s’implanter à Pau dans la seconde moitié du XIXème grâce à des Basques qui viennent effectuer leur service militaire au 18ème Régiment d’Infanterie.

C’est à l’un d’entre eux, Borda, allias Olharre, natif d’Ascain, qu’est attribué le fait d’avoir édifié au nord de la Haute-Plante, le petit fronton qui existait encore il y a quelques années.

Au début du XXème siècle, Pau possède sa salle de Jeu de paume, près du Parc Beaumont quand elle n’a encore aucun fronton.

Ernest Gabard, est à Pau le véritable précurseur de cette discipline. Avenue Trianon, en 1901, il y joue déjà, notamment avec Léon Garet et Émile Bugard

Au nord de Pau et aux confins de Billère, la place ne manque pas. La cancha de terre battue s’esquisse sur le terrain de son voisin, Émile Barbé, et le fronton n’est autre que le mur de pignon de son atelier fraîchement construit.

Au bas de quatre clichés Ernest Gabard a noté de sa main : 1901, début de la pelote basque à Pau, contre le mur de l’atelier… (photos ci-dessous).

 

Pau ne dispose pas de suffisamment de frontons pour satisfaire à la pratique d’un sport qui draine de plus en plus d’adeptes. Bourbaki a le sien, ainsi que la J.A.B., Jurançon et aussi Lescar car beaucoup de normaliens viennent du Pays-basque. C’est peu et ceux qui existent ne sont pas des frontons règlementaires de taille conséquente. Les Palois ne vont disposer d’un véritable fronton qu’en 1912. Il est situé à environ trois cent mètres au sud de la Croix de Prince, près de la propriété du Château Louvie, entre la route de Gan et la voie de chemin de fer d’Oloron.

Ce fronton fait 12 mètres de large, 14 de haut et la cancha mesure 70 mètres de profondeur. C’est immédiatement le succès. Des rencontres y sont organisées et sont conviées à venir s’y affronter les vedettes de chistera en vogue : Chiquito de Cambo, Eloy, Urutia, Arrué, Ayertaran, etc. 

À Pau on pratique beaucoup plus volontiers le jeu à main nue, mais certains commencent à s’adonner de plus en plus au chistera, plus spectaculaire, et surtout plus gracieux aux yeux de la bourgeoisie. Ernest Gabard, Charles Lagarde, Noutary l’architecte ou le docteur Félix Anthony sont ceux qui œuvrent le plus activement à sa promotion et à son succès. 

Aucun club n’est encore officiellement constitué.

Le 26 juin 1919, sous l’impulsion de quelques amis, le Fronton Club Palois voit le jour. Ses statuts sont publiés au Journal Officiel de la République le 9 juillet 1919. Son siège social est le café Moderne, 5 rue de la Préfecture.

Son Conseil d’Administration est ainsi constitué :

Président : Charles Lagarde

Vice-président : docteur Félix Anthony

Trésorier : Victor Mesplé-Somps

Conservateur du matériel : Ernest Gabard

            

Cette société a pour but :

-       1er : de développer à Pau, entre amateurs, le jeu de la pelote basque à main nue, et surtout à chistéra.

-       2ème : d’empêcher de disparaître cet admirable jeu local qu’est la pelote basque à chistéra et d’aider à son extension dans les Basses-Pyrénées et les départements voisins.

Dans les statuts de l’association, sont définies les fonctions de chacun. Celles dévolues à Ernest Gabard sont précisées à :

Art.12. Le Conservateur du matériel est détenteur et responsable des pelotes et des chistéras appartenant à la société. Il veille à leur renouvellement, à leur entretien, il fait réparer en temps utile, et remet les factures visées du Président au Trésorier.

Il met en service et délivre aux joueurs le matériel qui convient à chaque catégorie. Les joueurs s’ils croient avoir lieu de se plaindre à ce sujet ne doivent en aucun cas s’adresser au Conservateur du matériel, mais doivent porter leur réclamation au Président.

Art.27. Le Conservateur du matériel n’est responsable que du matériel appartenant à la société.

Art.37. La tenue obligatoire pour les matches est : chemise blanche, pantalon de toile blanche, sandales blanches fournies par le sociétaire, ceinture et béret bleu ou rouge fournis par la société.

            

Très actif, ce club participe à de nombreuses rencontres et, à partir de 1920, dispute le championnat de la Côte Basque.

Au printemps 1923, le Fronton Club Palois, est dissous et absorbé dans le giron de la Section Paloise. Ce rapprochement ce fait d’autant plus facilement que les nombreux dirigeants sont déjà membres des deux clubs. Ce qui, par contre, a motivé la décision de fusionner, c’est que la Ville de Pau a concédé à la Section Paloise un terrain, avenue de la Gare, pour y construire un fronton de pelote en place libre. L’inauguration officielle du Stadium de la gare, le 26 août 1923, donnera l’occasion au public palois de se familiariser avec ce nouveau sport en assistant à de nombreuses parties.

Dans l’équipe des pelotaris de la Section Paloise, en 1928, aux côtés d’Ernest Gabard, on trouve, les frères Prat, Capdeboscq, Barthe, Isidoro, Mesplé-Somps, Artigou, le docteur Anthony et un certains… Pierre Gabard, son fils âgé de 19 ans.

Sur un cliché relatif à une partie de pelote, que nous a laissé Ernest Gabard, un détail, pour ne pas dire, un « intrus », nous interpelle : une talenquère ?

La réponse est limpide. Construites par les frères Brienne, limonadiers à Pau, les arènes de la Croix-du-Prince sont démontables et installées sur la cancha du fronton. À l’occasion des parties de pelote, seulement une partie d’entre elles est démontée. Outre les concours landais, elles reçoivent aussi occasionnellement des combats de boxe.