/ Biographie
Henri de Vaufreland (1873-1957)
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Les charmes et la vie trépidante de Pau du début du XXe siècle ont su attirer, puis retenir, Henri Piscatory, quatrième vicomte de Vaufreland, "véritable gentilhomme", cavalier émérite, polyglotte et, comme si ça ne suffisait pas, mémorialiste et illustrateur des grandes heures de notre ville.
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Dans les travaux qu'ils lui consacrent, André Masson et Pierre Tucoo-Chala nous renseignent sur les origines et les activités de ce vrai Palois d'adoption.
Son arrière grand-père, Joseph de Piscatory, agent de change à Paris, épouse en 1759 Marie Adélaïde Rouillé de Lestang, héritière de l'un des somptueux hôtels de la place de la Concorde, où ses parents recevaient les plus grands savants et artistes du temps : Condorcet, Lavoisier ou le peintre Carle Vernet étaient des familiers. Sous la Révolution, Joseph s'engage dans les Hussards, devient lieutenant à 24 ans, colonel à 27 et général à 29. Disgracié par Bonaparte pour avoir bravement défendu le général Moreau alors accusé de complot, il se trouve sans solde et en retraite forcée. Louis XVIII le réintègre et le nomme maréchal de camp, puis par ordonnance royale lui octroie le titre de vicomte héréditaire en 1815.
Le nouveau vicomte reste très bien en cour sous Charles X qui apposera sa signature sur le contrat de mariage de son fils, Antoine Louis Fortuné (1796-1875), avocat général à la Cour de Paris.
Après la révolution de 1830, contestant la légitimité de Louis-Philippe qu'elle considère comme un usurpateur, la famille entre en opposition au régime et refuse de briguer des postes officiels.
La fortune de Joseph lui permet de mener un train de vie agréable entre son hôtel particulier parisien, sa propriété d'Auteuil et ses terres du Berry.
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Le père d'Henri, Auguste de Vaufreland, naît le 4 septembre 1837 au 26 avenue des Champs-Elysées.
Il épouse Lucie Martel, riche héritière de Cognac, fille d'un pair de France, ancienne élève de Madame Campan aux côtés de Stéphanie de Beauharnais, future duchesse de Bâde. Les deux femmes se voueront leur vie durant une profonde amitié. Dans ses Souvenirs, Auguste de Vaufreland reconnaît : « De 1855 à 1870, ma vie s'écoula en me donnant entièrement aux plaisirs de la bonne compagnie qui conservait encore un langage et une politesse particulière. Elle gardait des manières dont l'apprentissage ne se fait pas. I
l y avait deux sociétés très différentes et qui ne frayaient pas vraiment entre-elles, les Tuileries et le Faubourg. Mon père qui était demeuré ultra-fidèle à ses opinions, ne voulait pas que j'allasse chez aucun membre du gouvernement. Grâce à la duchesse Tascher de la Pagerie, je recevais des invitations pour les grands bals costumés où je me divertissais fort, en cachette des miens. J'ai donc vu ces brillantes réunions du second Empire et plus particulièrement les bals de la duchesse d'Albe (sœur de l'impératrice Eugénie de Montijo). En 1871, après la capitulation, Adolphe Thiers qui souhaite alors renouveler le haut personnel de l'administration, lui confie d'emblée le poste de préfet de l'Orne (1873), puis des Basses-Pyrénées en 1876.
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Vaufreland est élevé dans le culte du cheval, il suit les chasses des équipages les plus prestigieux.
Ce goût du risque, de sauts à l'aveugle et de galops effrénés le poussent vers la carrière militaire. Il débute sa carrière comme élève officier à Saint-Cyr puis à l'école de cavalerie de Saumur, fait ses premières armes en Afrique du Nord avant de démissionner en 1901 avec le grade de capitaine.
« Je débarquai donc un matin de décembre 1901, dans la patrie de Nouste Henric », c'est ainsi que s'ouvrent ses Carnets. Il descend à Pau, et s'installe avec ses chevaux, « Judith, Messaoud et Le Richi » dans un appartement situé au deuxième étage de l'English club (Cercle anglais), que lui avait réservé son ami Eustache Barron. En posant ses malles ce matin de décembre 1901, il ne sait pas encore qu'il s'apprête à jouer un rôle sportif, social et artistique majeur et qu'il s'apprête à passer les cinquante cinq prochaines années de sa vie à Pau.
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De son observatoire, Vaufreland est au cœur d'une société « Paloise » cosmopolite et scintillante. Il épouse Margaret Foster Barham ( 1878-1917), dont le père a longtemps présidé aux destinées du Pau Golf Club
et œuvré à la création du tennis club du parc Beaumont que, plus tard, Vaufreland modernisera et présidera pendant vingt ans. De cette union naîtra leur fille Bernadette, en 1913.
En 1914, il est nommé traducteur auprès de l'Armée britannique aux côtés d'André Maurois.
Veuf, il se remarie avec la baronne Hainguerlot, née Blanche d'Adhémar de Lantagnac.
La famille s'installe à Billère, villa Harat Etchea.
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Vite remarqué par le maître d'équipage Frederick Prince qui en fait le secrétaire du Pau-Hunt,
Vaufreland mène la vie de ses rêves. Il vit à cheval, assidu aux trois chasses hebdomadaires qui peuvent suivant l'humeur des renards durer chacune plusieurs heures, il quitte la veste rouge pour une casaque et file à l'hippodrome monter en steeple et en cross ses propres chevaux ou ceux confiés par des amis.
Avec ses amies les Miss Hutton, il écume les concours hippiques de Paris à Saint-Sebastien et, temps perdu, il s'assoit à sa table, saisit ses pinceaux et nous ouvre les portes très fermées d'un univers luxueux et raffiné, d'un monde aujourd'hui disparu.
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